jeudi 7 mars 2013

Life - Disparaître


50 kg pour 1m55

Il paraît que j’ai des formes. Plutôt jolies même, d’après les adultes. Je commence à avoir des hanches et pas mal de poitrine.
Mais à 13 ans c’est difficile. A 13 ans ça ne se fait pas de porter un vrai soutien-gorge et surtout pas du C.
D’avoir la taille fine et les hanches bien dessinées non plus.
Fini les petits débardeurs. J’ai ces choses en évidences.
Les garçons du collège me surnomment “gros seins”.
Leur nouveau jeu c’est arriver derrière moi discrètement, me toucher les seins et puis partir en courant.
Ça fait mal.
Mes copines ont beau être jalouses tout ça doit disparaître. Tout.

40 kg pour 1m55

Ils sont toujours là. Imposants. S’imposant à moi. Grossissant encore plus tout comme mes hanches d’ailleurs.
Pourtant je fais des efforts. Je ne mange presque plus.
Deux repas par jour. Ceux que je suis obligée de prendre avec ma mère.
Alors je prends des vêtements amples.
Des baggys, des sweats, rien de serré, rien de près du corps.
Se camoufler toujours.
Pourtant je les entends toujours m’appeler gros seins.
Ils jouent toujours aussi malgré les claques que j’arrive désormais à leurs rendre.
Ce n’est pas suffisant.

35 kg pour 1m55

J’ai beau perdre du poids mon corps reste énorme. Tout. Mes seins, mes hanches, mes cuisses, mon ventre. Tout est devenu gros, insupportable.
Je ne mange plus pourtant. Un bol de chocolat chaud, une tranche de jambon ou bacon et un yaourt par jour. C’est tout. Je pourrais grossir encore.
Je crois que cette balance est cassée. Tout comme celle du médecin d’ailleurs.
Ma mère s’inquiète. Elle m’a forcé à y aller.
Il m’a parlé d’anorexie, de soin, d’aide. De maladie. Mais je vais bien.
Il m’a interdit de maigrir encore. Je ne vais donc plus y retourner.

30 kg pour 1m55

Je ne mange plus qu’un yaourt par jour et c’est déjà trop. C’est difficile. Mon estomac n’en veut pas et pourtant je le garde. Je ne vomirai pas. Je ne suis pas malade.
Marcher est de plus en plus fatiguant. Je me trouve encore grosse et pourtant plus rien
ne me va. Mes jeans sont trop grands, mes soutifs aussi. Serai-je devenue normale enfin?
Je n’ai plus de surnom à l’école mais il faut dire que je n’y vais plus beaucoup. Le sac est tellement lourd, les cours sont tellement longs aussi. Mes nuits sont tellement courtes. Je suis tellement fatiguée.
J’ai n’ai plus tellement d’amis non plus.
Je crois que j’ai enfin réussi. Ce que je voulais plus que tout au monde.
DISPARAÎTRE.

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