Je suis là étendue sur mon canapé. A côté de moi mon
ordinateur sur lequel tourne un documentaire sur les rois de France.
Je ne respire plus. Je suis morte, seule.
J’ai 22 ans. Je suis jeune et pourtant je ne suis déjà plus
depuis quelques heures.
Normalement je devrais vous dire que même si je suis morte
jeune j’ai bien vécu, j’ai profité de la vie et au moins je suis morte
heureuse. Mais non, je ne le dirais pas.
Je n’ai rien accompli. J’ai tenté des études, que j’ai
lamentablement loupées sous prétexte de manque d’argent et d’incapacité à
trouver ma voie. J’ai un boulot, que je déteste plus que tout. J’ai un appart
que je paye trop cher et qui est dans un quartier pourri. Mon compte en banque
est vide, j’ai même des dettes.
Je ne voudrais pas
m’avancer mais je crois que je n’ai absolument rien réussit, ni rien fait.
Deux jours. Ça fait deux jours que je suis morte.
Personne ne s’en est rendu compte. J’ai bien le boulot qui a
appelé mais c’est tout.
J’ai aussi eux quelques sms d’amis s’inquiétant de ne plus
me voir sur Twitter.
En même temps ils seraient bien incapable de débarquer chez
moi pour venir me voir quasiment personne ne sait où j’habite.
Je suis une mauvaise amie. Je suis la fille qui peut très
bien ne pas donner de nouvelles pendant une semaine ou deux et puis revenir
dans ta vie et vouloir te voir plusieurs fois dans la semaine, comme une fleur.
J’ai toujours été comme ça. Même avec ma meilleure amie,
celle qui me supporte depuis mes 3 ans. Je suis capable de ne pas lui donner de
nouvelles pendant 1 mois et de lui envoyer plusieurs sms par jour subitement.
Ça m’apprendra à me
protéger de tout le monde et même des gens que j’aime.
Et maintenant sept.
Un voisin est venu frapper à ma porte. Vu l’état de mon
corps et les mouches j’imagine que l’odeur ne doit pas être exquise. Avec un
peu de chance ils finiront par faire quelque chose.
C’est quand même dommage que mes voisins viennent frapper
chez moi pour la première fois pour cette raison.
Ma mère a essayé de m’appeler. Je l’ai eu au téléphone 2
jours avant de mourir. Elle commence à s’inquiéter. Mais bon elle aussi est
habituée à mon manque de nouvelles. Elle s’inquiètera réellement d’ici trois
peut-être quatre jours.
Je pense que je
pourrais postuler à la ferme aux cadavres moi qui cherchais un travail.
Et enfin dix.
Ma porte vole en éclat, comme dans les films.
En fait non ma porte
ne vole pas en éclat, un serrurier est là, ouvrant la serrure sans réels
efforts. Derrière lui deux policiers et la concierge. L’odeur provoque un
haut-le-cœur à tout le monde. La concierge reste sur le pas de la porte. Ils
entrent.
Je savais que j’aurais dû ranger avant de me coucher. Je
n’ai même pas détendu le linge ni fais ma vaisselle. Mes fringues de la journée
trainent sur le sol devant le canapé. Deux poubelles sont dans l’entrée
attendant désespérément que je les sorte.
Il semblerait que même
ma mort je n’ai pas pu la réussir.
La frontière entre la réalité et l’imagination est aussi fine que celle
entre la vie et la mort.
Il suffit d’un rien pour basculer.